![Raoul DUFY (1877-1953), Les Régates, 1907-1908, huile sur toile, 54 x 65 cm. Paris, Musée d’art moderne, legs du Docteur Maurice Girardin, 1953. Musée d'Art Moderne de la ville de Paris / Roger Viollet.]()
Raoul DUFY (1877-1953), Les Régates, 1907-1908, huile sur toile, 54 x 65 cm. Paris, Musée d’art moderne, legs du Docteur Maurice Girardin, 1953. Musée d’Art Moderne de la ville de Paris / Roger Viollet. (© Adagp, Paris, 2019)
Le MuMa, au Havre (Seine-Maritime), rend hommage à un enfant du pays : Raoul Dufy est à l’honneur sur les cimaises du musée d’art moderne jusqu’au 3 novembre 2019. Plus de 80 œuvres venues des quatre coins du monde y sont présentées, dans le cadre de cette exposition qui s’inscrit dans la programmation d’Un été au Havre.
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Plus de 80 œuvres présentées
Raoul Dufy est né au Havre en 1877. S’il quitte la Cité océane pour Paris, il y conserve sa famille et ses racines. Attaché aux paysages de son enfance, le peintre entretiendra, tout au long de sa carrière, un rapport particulier avec sa ville natale.
« Nous avons rassemblé plus de 80 œuvres. Des aquarelles du début (1898, NDLR) jusqu’à la série des cargos noirs, nous présentons des œuvres qui permettent, à la fois, de dresser un état des lieux des toiles qui ont Le Havre pour sujets, mais aussi de nous poser de nouvelles questions. Comment se fait-il que, bien qu’éloigné du Havre, l’artiste y revienne si souvent, ou physiquement, ou de mémoire ? », questionne Annette Haudiquet, conservatrice et directrice du MuMa et co-commissaire de l’exposition avec Sophie Krebs, conservatrice au Musée d’art moderne de la Ville de Paris.
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Si cette exposition peut paraître convenue et attendue, les deux commissaires l’assurent : des interrogations ont émergé lors de l’accrochage, à la faveur de la réunion de certaines œuvres.
Se posent des questions d’influences, de datations. Nous sommes face à un artiste, dont les antennes étaient ouvertes et déployées vers de nombreux mouvements artistiques.
De l’impressionnisme au fauvisme, en passant par des traits expressionnistes, Dufy traverse les mouvements et les périodes.
Une identité complexe
De ses premières aquarelles qui témoignent d’un savoir-faire et d’un souci documentaire au dessin préparatoire du quai de déchargement de charbon, la première partie de l’exposition présente un Dufy qui a une dette envers Eugène Boudin et les impressionnistes. Sophie Krebs souligne :
N’oublions pas qu’en 1900, 240 œuvres de Boudin arrivent au musée du Havre. Puis, en 1903, Pissarro séjourne au Havre. Il faut bien comprendre que la présence de ces peintres est réelle. C’est très concret pour Dufy.
L’exposition est l’occasion de mettre en évidence l’identité complexe du peintre, qui a embrassé diverses périodes dans sa carrière. Du fauvisme à l’affirmation du trait, on voit, au fil de l’exposition, se libérer une touche. Matisse, Marquet, Braque… Dufy les côtoiera sans jamais se fondre dans leur pratique, mais en affirmant la sienne.
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Du pêcheur à la ligne à la baigneuse, en passant par les espaces d’évasion offerts par les fenêtres, Dufy laisse courir le pinceau sur la toile, affichant une liberté du geste et du mouvement.
Chez lui, le paysage est habité. Il essaie de rendre compte de l’atmosphère du vent par des éléments très contradictoires. Il porte aussi son attention sur les gens. L’animation fait partie du tableau.
Des motifs récurrents
![Raoul DUFY (1877-1953), Le Port du Havre, vers 1910, huile sur toile, 65,5 x 81,4 cm. Collection particulière.]()
Raoul DUFY (1877-1953), Le Port du Havre, vers 1910, huile sur toile, 65,5 x 81,4 cm. Collection particulière. (©Sotheby’s, New York / Adagp, Paris 2019.)
On croise dans la peinture de Dufy des motifs récurrents : vues de plage, défilés nautiques, rues pavoisées, baigneuses… « Le Havre est le berceau des premières expérimentations de Dufy. Le port et la station balnéaire occupent une place prépondérante dans son œuvre et suscitent un grand nombre de motifs qu’il n’aura de cesse de revisiter tout au long de sa carrière. Le Havre n’est pas seulement une ville, c’est aussi une atmosphère. »
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Dufy s’intéresse, dans ses toiles, tour à tour, au port, à la plage, au casino, aux bateaux… Sans oublier de travailler cette lumière, cette fameuse lumière havraise, qui, du bleu du ciel, glissera au noir des cargos. Si le peintre affirmera que le noir est « la lumière absolue », il soulignera, dans l’ensemble de son œuvre, la force du bleu, qui conserve son individualité et traduit si bien l’émotion d’un paysage maritime.
Malheur à l’homme qui vit dans un climat éloigné de la mer. Le peintre a besoin d’avoir sans cesse sous ses yeux une certaine qualité de lumière, un scintillement, une palpitation aérienne qui baigne ce qu’il voit, aimait à dire Dufy.
Le legs Dufy
Le MuMa possède 128 œuvres de l’artiste, soit une collection exceptionnelle, principalement issue du legs consenti par madame Dufy au décès du peintre en 1962. 30 tableaux, 30 dessins, cinq aquarelles, trois céramiques et une tapisserie, auxquels s’ajoute un bronze, avaient été cédés à l’époque.
Plusieurs dons et achats enrichiront progressivement la collection qui retrace plusieurs périodes de l’artiste. En 2012, le MuMa faisait l’acquisition de Fin de journée au Havre, première œuvre présentée par Dufy au Salon des artistes français de 1901.
De sa naissance au Havre à son intérêt pour la technique cézannienne, en passant par les courbes des baigneuses et les célèbres cargos noirs, l’exposition Dufy au Havre couvre les différentes étapes de la vie de l’artiste et ses différentes phases de création. Si l’artiste passa avec allégresse d’un mouvement à l’autre, jongla avec les couleurs, une chose perdura dans son œuvre : Le Havre. Sa madeleine…
Infos pratiques :
Jusqu’au 3 novembre 2019, au MuMa, 2 boulevard Clemenceau, au Havre.
Du mardi au vendredi,de 11h à 18h, le week-end de 11h à 19h. Fermé le lundi et le 14 juillet.
Tarifs : de 6 à 10 euros.